Florence Glémée, gérante du restaurant et conserverie Grain 2 Café à Plouasne (22) : “ Je pense qu’on a les moyens de faire du bon avec des choses simples.”

 “La persévérance est une des qualités indispensables pour réussir dans la vie, quel que soit le but à atteindre” déclarait le self-made-man John Rockefeller. Des propos qui pourraient grandement illustrer la perspicacité de la dynamique Florence Glémée, gérante du restaurant et conserverie Grain 2 Café à Plouasne (22). Interview d’une Femme de Bretagne qui mène de front ses ambitions et ses valeurs au coeur d’une belle entreprise riche d’histoire !

 – Florence, pouvez-vous nous présenter votre entreprise?

Ce bar a été créé par les grand-parents de mon époux Michel Glémée en 1929. Cette entité a traversé le temps grâce à une histoire de famille.

Ce sont les femmes qui ont fait vivre le bar et qui ont cherché à le développer. Initiatrice du projet, Marie-Rose, la grand-mère Glémée, propose café et cidre aux ouvriers. C’est ensuite la belle-fille, Ernestine dite “Titine », qui prolonge la vie dans ce lieu avec sa petite épicerie et ses harengs séchés. Après sa mort, son fils Michel et moi avons cherché à apporter un nouveau souffle à ce lieu.

Ainsi notre entreprise, Grain 2 Café, constitue un nouveau trait d’union entre le passé et le présent. Dans un premier temps, nous avons effectué des investissements. Nous avons ouvert une nouvelle structure en 2013 sous ma responsabilité. Nous avons créé un espace restaurant avec une véranda lumineuse et l’année suivante la cuisine a été remise aux normes.

 

– Vous prenez les rênes de l’entreprise familiale en 2013 : quelles étapes avez-vous franchies depuis cette période ?

En 2015 nous avons passé notre premier agrément pour la mise en place de la conserverie et cette année nous avons passé notre HACCP avec la mention très satisfaisant des services vétérinaires. Ce qui valide une qualité d’hygiène et de processus pour notre restaurant et notre conserverie. Cela nous permet de développer la gamme Mam Flo sur le marché national et international.

Les mises aux normes et agréments ont été des étapes longues et parfois difficiles. Notre métier exige une grande rigueur pour répondre aux législations.

A présent nous cherchons à finaliser 3 grandes étapes :

Cette année, je termine l’installation de mon système informatique. Avec la législation qui change au 1er janvier sur les caisses enregistreuses nous avons dû investir dans un nouveau logiciel de caisse. Enfin la conserverie qui se développe entraîne des besoins de gestion plus importants (client, traçabilité, gestion…) ; aussi nous avons investi dans un nouvel outil. Ce sont des investissements lourds pour une petite structure comme la nôtre.

En parallèle, je prépare une nouvelle phase de conception pour 2018, afin de sortir de nouveaux produits.

Enfin, un agent commercial travaille sur la Bretagne depuis 2016 ; aujourd’hui il faut que je développe notre force de vente. Cela induit d’embaucher du personnel.

Aujourd’hui vous êtes seule à la barre de Grain 2 Café : A quoi ressemble votre journée type ?

Je respecte un planning rigoureux en semaine : le matin je travaille au restaurant et l’après-midi à la conserverie. Entre deux, j’ai un téléphone greffé pour répondre aux fournisseurs, administrations,… et je sers au bar ! Le week-end je travaille sur l’administration et la gestion.

J’ai la chance d’être soutenue par mon mari. Aujourd’hui j’y trouve un équilibre ; néanmoins il est clair que pour faire perdurer l’entreprise, je vais devoir recruter un salarié.

 

– Quelles valeurs défendez-vous à travers cette entreprise familiale ?

Notre établissement est ouvert à toutes personnes qui cherchent l’authenticité et la simplicité. Nous servons les clients aux plats et pas à l’assiette. Certains préfèrent manger dans le bar plutôt que dans la salle de restaurant pour partager un moment de convivialité ou pour jouer aux fléchettes ou au billard russe.

On met tout en œuvre pour que la communication se fasse entre les personnes, quitte à les mettre sur une même table. On discute beaucoup avec nos clients, en général ils sont curieux. Ils nous posent beaucoup de questions sur la région, notre établissement, mais aussi nos animaux. Car mon mari s’occupe d’une « mini-ferme » avec poules, canards, oies, moutons, chèvres. Les enfants sont friands de la visite de cet espace, ils peuvent jouer sur la terrasse et dans le jardin sans risque. Notre attention première est toujours l’accueil et la convivialité.

 “Nous sommes des gens simplement humains,  nous aimons ces moments de partage. Cela rentre dans notre conception « de la famille ». C’est souvent l’opportunité de faire de belles rencontres humaines, qui dépassent nos frontières.”

 Enfin, ici, tout est fait-maison sans additif ni conservateurs. Cela me tient à cœur : je pense qu’on a les moyens de faire du bon avec des choses simples. Ma viande est française et plus encore bretonne. Je veux donner du plaisir à mes clients, d’où mon exigence quant au choix des matières premières. On a tous le droit de bien manger !

Dans cette optique, j’ai fait le choix de la viande Bleu – Blanc – Cœur qui correspond bien à ma philosophie. Cette association est née d’un collectif de paysans, scientifiques, agronomes, consommateurs et médecins qui changent la façon de produire nos aliments. Car, quand la terre est respectée, quand les animaux sont bien nourris, l’homme se nourrit mieux !

 

Vous êtes aussi investie auprès du réseau Femmes de Bretagne. Selon vous, quels sont les secrets de réussite pour devenir un bon entrepreneur ?

J’aime beaucoup ce réseau, les valeurs sont saines et il n’y aucune notion politique.

J’ai eu l’occasion de faire de belles rencontres et il m’arrive encore aujourd’hui de faire appel à leurs services. Lorsque j’ai des difficultés d’ordre réglementaire ou juridique sur des dossiers pointus, j’y ai toujours trouvé des réponses. Ces femmes sont à l’écoute et prêtes à donner de leur temps pour s’entraider.

Les ateliers abordent des sujets différents, il suffit de choisir en fonction de ses besoins.

Le côté humain et bienveillant permet d’échanger facilement, mais surtout de sortir de sa société et de voir ce qui se fait autour de soi.

Je regrette de ne pas avoir assez de temps pour aller dans certains ateliers, notamment quand je vois ce que nous prépare Delphine Guglielmini à Combourg !

Je pense qu’aujourd’hui, au-delà du savoir-faire il faut être un bon gestionnaire et ne rien lâcher. Il faut croire en soi et surtout être soutenu par sa famille. Avoir un réseau est très important pour ne pas se sentir isolé et avancer.

 

Pouvez-vous nous présenter vos nouveaux projets ? Comment souhaitez-vous voir votre entreprise d’ici 5 ans ?

Dans un premier temps, nous voulons développer le chiffre d’affaires avec des décisions stratégiques pour la force de vente du côté de la conserverie. Mais aussi trouver de nouveaux marchés au niveau national. J’aimerais donc qu’à la fin 2018 nous ayions un agent sur chaque région. C’est un gros pari et rien n’est gagné.

Toujours pour la conserverie, il faut créer de nouvelles gammes donc résoudre des problématiques de conception comme le déphasage de crème fraîche à haute température.

Evidemment, il faudra faire du marketing mais aussi définir une réelle stratégie de développement. Mettre en place une forte communication web pour le restaurant et la conserverie. Développer le réseau local pour attirer plus de monde dans le restaurant et installer dans les esprits la marque Mam Flo.

Enfin, le gros dossier 2019 portera sur la création d’une nouvelle unité de production.

Franchement mon rêve le plus fou dans 5 ans est d’avoir une unité de production qui tourne avec des employés pour le restaurant et la conserverie ; le marché Français ouvert sur sa totalité ; des gammes complètes en Bleu-Blanc-Cœur et en Bio. Enfin, ouvrir le marché européen voire plus si possible ; une dimension qui me passionne déjà !

“Je pense qu’aujourd’hui, au-delà du savoir-faire il faut être un bon gestionnaire et ne rien lâcher. Il faut croire en soi et surtout être soutenu par sa famille. Avoir un réseau est très important pour ne pas se sentir isolé et avancer.”

 

– Pour avancer dans ce sens, vous lancez une campagne de crowdfunding. Pourquoi ce choix ? Que va-t-elle financer ?

Je suis dans une phase de transition. A ce jour je dois finir de rembourser les investissements de départ, ce jusqu’en 2019. Je ne souhaite pas contracter de nouveau crédit à la suite ; toutefois je veux accélérer notre processus de développement. Notre campagne de crowdfunding vise à financer la partie conception et marketing dont les budgets sont importants.

Pour la conception il faut faire appel à un laboratoire extérieur et valider les processus auprès de la DDPP. Il faut compter 20 000 euros, ce qui est déjà beaucoup pour ma petite structure. Et avant de proposer un nouveau produit sur le marché il faut l’habiller et l’intégrer dans une communication d’ensemble ; pour ce travail j’envisage un budget à 10 000 euros.

C’est un pari fou, mais j’ai envie de le lancer. Je pense que nos produits sont bons et j’ai envie de mettre en avant notre Bretagne et notre savoir-faire.

Article rédigé par Virginie Le Duff

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